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19 novembre 2012 1 19 /11 /novembre /2012 00:52

 

 

L’ANNEE 2012 A VU LA CONCRETISATION DE DEUX PROJETS :

 

Tout d’abord la traduction et l’édition en langue malgache de notre manuel de formation.

Tarolalana momba ny fahasalamana

Nous distribuons gratuitement ce manuel présenté sous la forme d’un cahier d’écolier, à l’ensemble de nos stagiaires et de leurs formateurs malgaches.

Ecrit dans un langage simple et largement illustré, il est  d’unaccès facile et reprend l’essentiel des notions sur l’hygiène, l’alimentation, la protection contre les grands fléaux et sur la protection des grossesses en situation précaire.

Ce manuel est disponible au prix très raisonnable de six mille ariarys (environs deux euros ) en librairie et chez l’éditeur  Edisonia, Antananarivo.

 

jean luc et Marie ClaudePuis, aux mois de septembre et octobre, la formation d’une centaine d’agents communautaires de santé dans la province Ihorombé.

La province Ihorombé se trouve à la limite du grand sud, elle abrite un peu plus de deux cent mille habitants qui appartiennent pour la plupart à l’ethnie Bara. Ce sont des éleveurs de zébus répartis en petites communautés  qui nomadisent au gré des saisons et des brulis sur une plaine immense évoquant le Far West. Elle comporte quatre districts médicaux et trente et un Centres de Santé de Base.

La première mission a été conduite par Guillaume, infirmier hospitalier au CHU de Montpellier. Il était assisté de Véronique qui est depuis de nombreuses années, agent communautaire de Tuléar. Elle a suivi le cycle de formation en 2009 et depuis cette époque, a gravi les étapes pour devenir instructeur  et participe aux missions dont elle est tout à la fois l’interprète et l’animatrice pleine de talent et de dynamisme.

La deuxième mission a été confiée à Joêl, infirmier hospitalier à Tuléar. Il renonce à  ses vacances pour travailler avec Hysope Santé et a déjà à son actif la formation d’une centaine d’agents communautaires.

Avec ces précieux collaborateurs et quelques autres, nous constituons les équipes qui d’année en année permettront de diffuser et d’amplifier la résonnance de nos programmes.

 

Mais la participation des malgaches à notre œuvre ne se limite pas là.

Cette année ce sont encore deux médecins de Ihosy et de Iakora qui ont suivi  la formation et qui assureront la validation des connaissances acquises.

                                                       LA VALIDATION NECESSAIRE.

 

      Il n’existe pas de programme pédagogique qui ne soit assorti d’une grille de validation.

Nos équipes sont sensibilisées à cette évidence qui se pratique à tous les niveaux.

Evaluation du préacquis de nos élèves en début de stage.

Evaluation des acquisitions en fin de stage.

La validation sur le moyen terme est confiée aux autorités sanitaires malgaches,

Elle se fait sur

               Le contrôle des connaissances

                               L’évaluation des pratiques quantifiables.

                               L’amélioration des conditions sanitaires dans les fokotan (villages)

 

Et enfin au bout de deux ou trois ans nous retournons dans les fokotan pour reprendre un contact amical avec nos élèves et évaluer la transformation

 

  P1060153

 

 

Ces stagiaires de la promotion 2009 ont inventé ce système astucieux de lavage des mains

 

 

 

L’adhésion du peuple malgache à notre programme éducatif se mesure aussi au soutien de la Fondation Telma. Fondation malgache reconnue d’utilité publique qui adhère à nos objectifs et nous assure son soutien sur le long terme.  Nous sommes particulièrement fiers de ce soutien et tenons à le faire connaître à l’ensemble de ceux qui nous aident. A travers ce soutien, la société malgache  prend ses destinées en main et nous fait honneur en s’associant à notre travail humanitaire.

 

                                                                                             

 

 

 

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21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 22:13

L’année 2012 doit nous permettre d’accentuer notre présence à Madagascar et de développer les projets au Sénégal. Des contacts ont été pris avec Hysope Santé par une délégation parlementaire du Nicaragua.

 

L’année 2012 doit également nous permettre d’élargir le cercle de nos donateurs et de fidéliser nos donateurs initiaux, conditions indispensables au développement de nos missions.

 

Une ou plusieurs sessions de formation pédagogique des chefs de mission seront organisées au cours du premier semestre.

 

Le manuel Hysope Santé de formation aux soins primaires est dores et déjà disponible sur internet. Une traduction en langue malgache sera éditée et mise à la disposition de nos missions dans les toutes prochaines semaines, édité par MD Paoly à Antananarivo. Gérard  Rakotomanana et Fabrice Ratrema, membres de Hysope Santé sont en train d’assurer la relecture du texte en vue du bon à tirer. 

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21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 22:09

L’année 2011 et mérite d’être considérée comme une année charnière dans la vie de notre association crée à la fin de l’année 2009,

Asseoir notre identité sur le plan administratif et fiscal,

- Etablir nos statuts et édiger notre charte, fabriquer les outils de communication  tels que le projet associatif et différents documents destinés à nos sponsors, à nos donateurs privés et aux états étrangers avec qui nous envisageons d’établir des partenariats.

 

Elle a été marquée par l’arrivée de nouveaux membres au nombre d’une trentaine, venus de tous les horizons, par la participation à plusieurs manifestations régionales ou privées au cours desquelles elle a fait connaître ses projets.

 

Elle a été marquée par la recherche de donateurs privés et institutionnels qui ont répondu généreusement et nous mettent en possession d’une trésorerie suffisante pour commencer nos missions dès l’année 2012. Nous comptons actuellement une dizaine de donateurs français et malgaches.

 

Elle été marquée par la signature de plusieurs accords avec Madagascar et par l’avancement des contacts avec le Sénégal.

 

Elle a été marquée par des accords de partenariat techniques avec le SAMU de l’Hôtel Dieu de Paris et avec la Société de médecine d’urgence de la Réunion qui mettent  à notre disposition leur savoir faire et un réservoir éventuel de chefs de mission,

 

La mission Sénégal  est  conduite sous la responsabilité de Lyne Lysik, vice-présidente. Lyne s’est rendu plusieurs fois au Sénégal et a pris des contacts officiels avec le ministère de la Santé, elle a également rencontré les autorités médicales de Bambey et de Linguère, Marc Vantroys quant à lui a rencontré le directeur régional de la santé de Ziguinchor. Les concertations sont appelées à se développer.

 

La mission Madagascar s’ouvre comme une suite logique du travail qui a été mené depuis 2007 sous l’égide du Conseil Général de l’Oise et entièrement financée par lui. Il nous faut ici le remercier car cette mission conduite dans la province de Tuléar nous a permis d’affiner la cohérence et la pertinence de notre projet. Nous demanderons au Conseil Général d’accompagner sous une forme ou sous une autre la poursuite de cette mission.

Le Ministère de la Santé Malgache a demandé officiellement à Hysope Santé de poursuivre cette action dans trois nouvelles provinces et le Ministère des affaires étrangères nous a fourni les autorisations nécessaires pour exercer sur le territoire de Madagascar.

Une mission exploratoire a été menée en 2011 dans la province Ihorombé située à la limite des hauts plateaux et du grand sud. Deux missions sont prévues en septembre 2012 qui permettront de former une centaine d’agents de santé communautaire. Elles seront confiées conjointement à un chef de mission français et un chef de mission malgache.

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21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 22:08

Mission assurée dans la province de Tulear à Madagascar dans le cadre de la coopération décentralisée pour le compte du Conseil Général de l'Oise

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21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 22:08

Extrait du rapport de mission fevrier 2009

Les émeutes de la faim.

 

   Tous les magasins ont cloué leurs volets, le patron de l’hôtel a congédié son personnel, le dernier avion pour la capitale est parti depuis trois jours. La chaleur liquéfiante de l’été austral abrase les volontés, ramollit les énergies et rien ne se passera plus désormais. Le vrombissement des moustiques a laissé place au bruit des mouches, les prostituées désœuvrées arpentent le front de mer et les vagues tièdes au-delà de la mangrove viennent lécher sans bruit le tronc des palétuviers ravagés par le dernier cyclone. Les épaules musculeuses du tireur de pousse-pousse se soulèvent au rythme de son pas allongé, quelques gouttes de transpiration coulent sur son dos et un large sourire éclaire son visage au moment ou l’avenue qui conduit au front de mer, amorce sa descente. Une fois dépassées les grilles de la mairie doublement cadenassées, il agrippe ses brancards et se met à courir, le corps soulevé à chaque foulée par le poids de son passager.

   C’est parvenu au niveau du cinéma le tropic qu’il se voit dépasser par un coureur à pied, puis deux puis trois, quatre, des jeunes ,des enfants, de vieux hommes et même des femmes tenant les pans de leur robe à la main. De droite et de gauche ces marathoniens improbables dépassent le malheureux tireur de pousse-pousse qui ne comprend d’abord rien à sa déconfiture ; ils semblent sortir de partout et viennent grossir de minute en minute la colonne des émeutiers qui ralentit sa course. Dans un ample mouvement de rotation il pose ses brancards contre l’épaulement du trottoir et son client débarqué, rejoint avec son véhicule le flot de plus en plus dense qui se dirige vers les entrepôts.

   Petit port envasé sur la  rive malgache du canal de Mozambique, relié à la capitale par  950 kilomètres de ruban asphalté,  Tuléar respire difficilement au rythme anémié d’une ville de province sans arrière pays. En dépit d’un charme désuet hérité de son court passé colonial, la petite ville est un bout du monde au-delà duquel s’arrête tout ce qui ressemble à une route ou même une piste. Après Tulear commence le pays de l’aventure, des quatre-quatre, des baobabs et des cactus aux formes improbables, les fleuves se franchissent à gué  et les pistes défoncées plongent vers une mer vide ou nagent les baleines.

   Depuis trois jours la ville est privée de nouvelles.  Tananarive s’est tue lorsque les émeutiers se sont emparés des bâtiments de la radio et de la télévision ; des révolutionnaires aguerris se les seraient appropriés pour clamer au pays leur fragile victoire, mais ils les ont brûlés et dès lors condamnés au silence, laissent les informations se transmettre par murmure. On ne capte plus que RFI mais les radios françaises ne semblent pas avoir pris la mesure de la gravité des événements dans la ville aux sept collines qui a pour habitude de régler ses problèmes dans la cendre.

   Deux hommes, à l’ombre du palais détruit de la reine Ranavalo, se disputent le pouvoir. Tout le monde connaît la figure du président Marc Ravalomanana, elle orne les bureaux officiels, les postes de douane, les hôtels, les mairies : un homme des hauts plateaux, jeune et grand au visage à peine basané, son regard et son menton trahissent la volonté implacable qui fait les présidents. Sa silhouette mince est habillée d’un costume strict orné de quelques décorations et rehaussé par l’écharpe dorée d’un grand ordre de Madagascar. En face de lui, son adversaire est moins connu. Même taille, même regard de rapace, costume sombre, chemise rayée et large cravate couleur sépia. Le portrait d’Ange Radjoelina s’étale en première page d’un quotidien de l’avant-veille qui traine sur une table. Il est maire de la ville de Tananarive, bouge beaucoup, parle encore plus et sans le connaître vraiment, les malgaches sont de plus en plus nombreux à lui accorder leur sympathie. On l’appelle ici familièrement Andry  et le surnom de TGV qui lui a été attribué depuis quelques semaines, en dit long sur ses ambitions et les moyens expéditifs qu’il compte utiliser pour  y parvenir sans attendre le vingt deuxième siècle. De lui les murmures ne disent rien de plus et il bénéficie de la grâce accordée aux messies.

   Marc Ravalomanana, le président aujourd’hui contesté, a été porté au pouvoir voici dix ans par la désespérance d’un mouvement populaire analogue à celui qui secoue l’île aujourd’hui. Le riz était déjà en cause ; aliment exclusif des gens pauvres comme l’était le pain en France jusqu’au dix neuvième siècle, il transforme la précarité en misère noire pour une augmentation infime de son prix. Les gens de la ville sont touchés de plein fouet mais le sort des ruraux n’est guère plus enviable : un pouvoir d’achat pratiquement nul les condamne à l’autosuffisance et si ceux qui produisent du riz mangent à leur faim, les autres qui font pousser le manioc sont condamnés à une alimentation débilitante et fortement carencée en protides. Tous sont à la merci de la pluie et du vent, un cyclone ou une sécheresse signifient pour eux la famine dans les prochains mois.

   Deux ans après sa prise de pouvoir, Marc Ravalomanana se faisait élire triomphalement à la présidence de la république. Le pays ne s’était pas remis de dix ans de communisme et depuis le départ des Russes au début des années quatre vingt dix, les présidents successifs plus corrompus les uns que les autres avaient conduit le pays bien au-delà de la ruine. Plus rien ne ressemblait à une route, à une école ou à un hôpital, tout était à faire et Ravalomanana s’était vu dès sa prise de pouvoir, chargé de l’espoir démesuré d’un peuple désespéré. Il avait la stature d’un homme d’affaire avisé et appartenait à l’une des familles les plus riches de ce pays pauvre. Il ne pourrait être pire que les précédents et sans doute détenait-il les secrets de la réussite pour en faire bénéficier le pays dont il devenait président en 2002. Cinq ans plus tard il était réélu mais tout le monde s’accorde à penser qu’il avait pour ce faire, recouru à la fraude. Ses ennemis ne le lui ont pas pardonné et même ses inconditionnels ne savent plus quoi espérer.

   Depuis qu’il est au pouvoir les affaires personnelles de sa famille se sont résolument étoffées ; la totalité de la grande distribution lui appartient, les magasins Ticko et la chaîne de supermarchés Magro contrôlent quatre vingt pour cent du commerce de l’île et on l’accuse d’avoir dépossédé de nombreux petits paysans pour vendre de véritables latifundia à une société agricole chinoise ou coréenne. On l’accuse d’une autre malfaisance ; pour la première fois dans l’histoire de la francophonie, le président de la république malgache est incapable de s’exprimer de façon intelligible dans la langue de Molière, ses adversaires le prétendent illettré et tous s’accordent à constater qu’il a besoin d’un interprète pour prononcer ses discours officiels. Un pape en somme qui aurait perdu son latin ! Tout cela est un peu vexant pour la francophonie et très gênant pour le président d’un pays dont les lois sont écrites en français.

   Tous ces méfaits dont on l’accuse sont certes pendables mais plus d’un dirigeant, et pas seulement africain, a pire à se reprocher. Ravalomanana aurait sans doute pu prolonger quelques temps encore sa carrière présidentielle si son malheureux pays ne s’était trouvé, parmi les plus pauvres du monde, une des premières victimes de la crise économique mondiale. Après avoir massacré le CAC 40 et vidé le bas de laine des épargnants, la crise s’attaque aux pays les plus fragiles  et nous sommes nombreux à penser que les pillages de Tuléar ne sont que les premières manifestations d’un nouveau désordre mondial auprès duquel les malheurs de la Palestine ou du Dalaï Lama feront bientôt figure de comparses.

   Dans ce contexte délicat, Ravalomanana offre à ses adversaires une affaire ennuyeuse qui va contribuer dès le début du mois de janvier à déstabiliser son image. Il achète à titre privé un avion présidentiel, un Boeing 737 financé pour un tiers par les fonds publics et pour le reste par des fonds occultes accordés par quelques généreux investisseurs, coréens ou chinois.

   En face de ce vieux président qui ne parait pas ses quarante cinq ans, Ange Radjoelina se présente comme un jeune loup aux dents longues et politiquement impubère puisqu’il n’est pas assez âgé pour accéder aux fonctions présidentielles si d’aventure il parvient à renverser son adversaire. Il est entré en politique voici deux ans en se faisant élire maire de Tananarive  et depuis ce jour, ses réformes et la cadence avec lesquelles il les conduit lui ont valu ce fameux surnom de TGV.

   De ce monsieur TGV on ne sait pas encore grand-chose sinon qu’il prétend faire mieux que l’actuel président. Les évènements musclés ont réellement commencés à Tana voici une dizaine de jours ; répondant à l’appel de leur maire, cinq cent mille manifestants disciplinés et correctement encadrés par le service d’ordre municipal, ont défilé sur la place centrale aux cris de « Ravalomanana démission ». Ce dernier était ce jour en déplacement officiel en Afrique du sud, il en est revenu d’urgence, son Boeing chargé à ras bord de mercenaires sud africains que l’on accuse depuis, de tous les méfaits. Jusqu’à la déplorable fusillade du 7 février, quand tirant à bout portant sur  la foule, la garde présidentielle a donné froidement la mort à une soixantaine de manifestants. Une bavure qui rappelle les chars de Budapest et la place Tien an men.

   Cependant le tireur de pousse-pousse s’est remis dans les brancards et se fond dans l’émeute qui se dirige vers les magasins Magro, la chaîne du président. Quand à moi, je suis presque rendu et il me suffit de quelques mètres pour me trouver devant la maison de celle qui m’a demandé de venir. Un petit enfant de trois ans qui pèse 5 kilos et qui perd ses cheveux, c’est normal docteur ? J’avais subodoré une carence protidique chronique et glissé dans ma serviette quelques boîtes de lait concentré sucré. Elles y resteront car la maison est close et les volets cloués. Cependant dans le jardinet les premiers pillards sont de retour et commencent à se partager le butin. Des bouteilles d’eau, des sodas, de la bière, un sac de ciment et plusieurs sacs de riz qui viennent d’être éventrés, un fût d’huile. Je n’ai évidemment rien à faire au milieu de tout ça et si le consul de France me savait ici, il en ferait une jaunisse, lui qui a recommandé par e-mail à tous les hôteliers de mettre leurs touristes dans le premier avion venu. Mais mon hôtelier n’existe plus et je sens dans la poche de mon sac le relief d’un petit appareil photo. La tentation est forte et sans prendre de risques démesurés je vais pendant trois heures me livrer aux émotions du safari-potos. Les malgaches sont plutôt gentils mais un coup de machette malheureux et c’est la catastrophe. Ce soir, une fois les rues vidées de leurs émeutiers, on ramassera trente corps sans vie.

   Il me faut déguerpir sans attendre et finalement je me réfugie devant une porte fermée, ne sachant s’il convient de monter, de descendre, de rester ou de m’aplatir par terre quand un rideau s’ouvre derrière moi et une voix courroucée « Vous dégagez ou vous entrez, mais ne restez pas ici, vous allez nous faire repérer ! ». J’entre évidemment, dans la salle déserte d’un restaurant assez distingué, généralement fréquenté par les touristes. Le gérant claque littéralement des dents, il a mis sous clé les assiettes, les bouteilles, l’électrophone et tout ce qui représente quelque chose de bon à piller. Mais les murs de son restaurant ne sont que des rideaux de roseau et rien ne le protège de la rue. Pendant quatre heures, à travers les lattes écartées nous contemplons la longue cavalcade semblable à une procession de fourmis. Colonne noire sur la droite, les candidats au pillage se pressent coude à coude, se bousculent, se dépassent, s’écartent sur la gauche de la colonne blanche aux dos chargés de riz, qui trottine pesamment pour regagner les faubourgs. Par moments, une agitation incongrue semble émouvoir l’ordre processionnel ; les porteurs de sacs se mettent à courir, se bousculent, laissent tomber leur charge et la reprennent à grand peine, effrayés par un camion de militaires qui surveille à quelques distance sans intervenir le déroulement du pillage. Ils n’ont sans doute pas reçu d’ordres et d’ailleurs n’en recevront pas jusqu’à ce que les  entrepôts du président soient vidés de tout ce qui est à prendre, désossés, et qu’il n’en reste plus que quelques pierres. La curée va durer trois jours, émaillée d’évènements risibles et d’incidents dramatiques.

   Le silence. J’ai toujours imaginé la prise de la Bastille comme une fête populaire émaillée de cris, de débordements et de coups de feu. Rien de tel ; toutes les scènes du pillage pendant trois jours, se sont déroulées dans un silence impressionnant. Juste quelques appels, bruits de conversation et le halètement des porteurs. On avait l’impression d’une  hâte à bien faire et à faire vite pour bientôt revenir.  Quelques explosions au milieu de la nuit étaient sans doute le fait des vigiles, mais les malgaches ne sont pas armés, en tout cas pas d’armes à feu et les machettes et coupe-coupe ne font pas de bruit. Au matin du deuxième jour quand le directeur de l’hôpital me montre la liste des décès, la plupart de ceux qui sont arrivés jusqu’à l’hôpital étaient morts d’électrocution en tentant de forcer  les entrepôts d’un indien sur la route de l’aéroport.

   Deux jours plus tard, le calme est enfin revenu. A bord d’une vieille Renault réquisitionné par les gendarmes, je me suis embarqué d’office et nous sillonnons les villages qui bordent Tuléar. La curée est en train de se terminer et le soir même les militaires prennent la situation en main ; deux gros camions de l’armée sont en train de s’emplir ce que les pillards n’ont pas eu le temps de ramasser.

 

 

 

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